2ème édition des Conversations Transatlantiques

2ème édition des Conversations Transatlantiques 

 Synthèse des échanges 

 

 

Aux fondements de la démocratie 

Gouverneur Morris et Montesquieu : deux figures de la liberté

 

26 avril 2022 – Terrasse des Champs-Elysées 

50 avenue des Champs-Elysées 

Paris 75008

 

 

Le 26 avril dernier, à la Terrasse des Champs-Elysées, les Amis de la Fondation Saint-Omer Valeurs Transatlantiques ont organisé la 2ème édition des Conversations Transatlantiques sur le thème de la gouvernance et de la répartition des pouvoirs avec pour invités Emilie Mitran (docteur à l’université d’Aix-Marseille) et Hugo Toudic (doctorant en philosophie politique à Sorbonne Université). 

 

A l’occasion de la récente sortie du livre d’Emilie Mitran, Gouverneur Morris, traducteur de la Révolution française (Les Perséides, Rennes, 2022) et de la parution de l’article “Montesquieu and The Federalist: A Contested Legacy” (Early American Studies, University of Pennsylvania), écrit par Céline Spector et Hugo Toudic les Conversations Transatlantiques ont mis en lumière Gouverneur Morris et Montesquieu, deux figures centrales dans le développement de nos démocraties occidentales.

 

 

 

Il s’agissait de faire parler Gouverneur Morris, un père Fondateur resté dans l’ombre de James Madison et Alexander Hamilton. Auteur de la célèbre phrase « We the People » et grand contributeur à la naissance de la nation américaine, Morris voit au-delà des États croyant en la réunion des peuples. Néanmoins, ce républicain dit ’’conservateur’’ reflète, dans la pratique, toute l’ambivalence de l’idée républicaine. 

 

Ambassadeur des États-Unis en France de 1792 à 1794, c’est en observant la société française qu’il défend l’idée selon laquelle celle-ci n’est pas suffisamment mûre pour devenir une République. Son message est fort :  la gouvernance des peuples n’est pas un modèle universel. La gouvernance reposerait sur des règles qui sont propres à la culture de chaque peuple, Morris prônant pour la France une monarchie constitutionnelle. Il ira même jusqu’à devenir proche conseiller de Louis XVI. Cette idée forte, à l’encontre même des principes républicains pour lesquels Morris a œuvré aux États-Unis, ne manque pas de le mettre en conflit avec Jefferson qui le présente comme un traitre à la République. 

 

Très inspiré des théories de Montesquieu, qu’il ne cite pourtant jamais, Morris promeut l’idéal de l’Esprit des Lois à Paris. La gouvernance des peuples n’étant pas un modèle universel, il convient de l’adapter à la culture et aux spécificités de chaque peuple dans le respect des principes humanistes. L’équilibre des pouvoirs est également à respecter pour Morris. Les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire doivent être séparés tout en s’accompagnant, pour le législatif, d’une bonne représentativité des peuples au Parlement. 

 

Les idées de Morris sont à mettre en parallèle avec les grands défis de nos démocraties au XXIème. La crise des gilets jaunes, les demandes pour une démocratie plus directe, plus représentative, les échecs de la convention citoyenne pour le climat en témoignent : une bonne partie du peuple ne croit plus aujourd’hui en sa représentation par le Parlement. 

 

 

 

Les Conversations Transatlantiques ont également abordé la question du fédéralisme à travers la pensée de Montesquieu, référence incontournable dans le débat constitutionnel américain ayant agité la société américaine de 1787 à 1788 et bien au-delà. Unanimement reconnu comme le ’’Newton du monde moral’’ dans la jeune Amérique, les idées du philosophe français sont beaucoup plus connues aux Etats-Unis qu’en France. Bien qu’inventé à Philadelphie en 1789, l’Etat fédéral moderne est avant tout une inspiration de la pensée de Montesquieu. 

 

L’Esprit des lois constitue une réflexion sur la « république fédérative ». Présentée comme une « société de sociétés », celle-ci regroupe une pluralité d’Etats fédérés, conservant de nombreuses prérogatives, au sein d’une entité centrale, l’Etat fédéral. L’intérêt du fédéralisme serait de permettre la bonne administration des biens communs tout en protégeant les intérêts des peuples et la souveraineté des Etats fédérés. Le fédéralisme, à travers un partage strict des compétences entre organes fédéraux et Etats fédérés permet également de garantir l’équilibre des pouvoirs, principe cher à Montesquieu : 

 

« Pour qu’on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que, par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir. »

 

Montesquieu, L’Esprit des Lois, Livre XI, chap. IV

 

Enfin, tout comme Gouverneur Morris croit en un gouvernement adapté à la culture et aux spécificités de chaque peuple, Montesquieu croit qu’un gouvernement n’est pas une fin en soi, mais un moyen, et que le moyen doit être adapté à la fin qu’on se propose d’atteindre (De l’esprit des Lois, Livre XI, Chap. 5 – De l’objet des États divers). La pensée de Montesquieu reste aujourd’hui d’une extrême modernité par rapport à la question de la construction européenne. 

 

 

A travers, les idées de Gouverneur Morris et de Montesquieu, cette 2ème édition des Conversations Transatlantiques participe à la mission que s’est donnée l’association des Amis de la Fondation Saint-Omer Valeurs Transatlantiques, à savoir partir des racines humanistes du XVIIIème siècle et des leçons du passé pour éclairer les débats démocratiques d’aujourd’hui. 

 

C’est également au nom des valeurs humanistes et de démocratie, ainsi que de sa devise : « Values for Action », que Les Amis de la Fondation Saint-Omer Valeurs Transatlantiques agissent également aujourd’hui pour les familles Ukrainiennes déplacées à cause de la guerre. Le 8 mai a rappelé la victoire de la démocratie sur le totalitarisme. 77 ans plus tard, nos démocraties sont de nouveau menacées et nous espérons la même victoire.  

 

 

Arthur Doncker

 

Terrasse des Champs-Élysées
2ème édition des Conversations

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